Les 22èmes Etats généraux de CAIPS du 22 octobre 2021 portaient sur l’accompagnement, sous l’intitulé « L’accompagnement, tous concernés ! ». En ouverture, CAIPS a réaffirmé une conception de l’accompagnement largement partagée par les affiliés, issue des travaux préparatoires, que nous entendons continuer à défendre.

Tel que conçu par la fédération CAIPS, l’accompagnement est un modèle exigeant à mettre en œuvre, qui se confronte aux réalités socioéconomiques, politiques et institutionnelles, un horizon vers lequel tendre inlassablement à défaut de l’atteindre. Une conception que nos travaux préparatoires avec nos affiliés révèlent pourtant très cohérente.

La Charte de la fédération situe sans ambages l’accompagnement au cœur de nos missions. Acteurs de leurs parcours, les bénéficiaires sont épaulés dans leur cheminement vers l’emploi, l’autonomie sociale et la citoyenneté active (faite de droits et de devoirs réciproques). L’accompagnement, inscrit dans l’ADN du secteur depuis sa genèse, nous concerne tous : formateurs, responsables de centres, coordinateurs pédagogiques, assistants sociaux, agents d’insertion… et personnes accompagnées. Il renvoie à des fonctions spécifiques mais n’en est pas moins transversal. Notre expertise en la matière est multiple et pointue… Mais est-elle pour autant pleinement reconnue ?

En cette année 2021, sur fond de pandémie qui s’étire et de crise migratoire qui perdure, les inégalités et la précarité s’accroissent encore. Comment l’accompagnement peut-il répondre au mieux aux besoins en constante évolution des publics en lutte pour le maintien d’allocations sociales, en trajectoire d’insertion, en démarche de formation ou en recherche d’emploi ? Des pistes claires existent d’ores et déjà. CAIPS entend les étayer et les porter haut et fort.

En prélude à ces Etats Généraux 2021, les affiliés réaffirment une conception largement partagée de l’accompagnement, que nous entendons continuer à défendre. Elle peut être esquissée comme suit : Une démarche qui part des réalités de la personne et s’y adapte, dans une approche humaine, menée en collaborations, qui fait sens pour les intéressés et les place en position d’acteurs, cherche à transformer l’environnement sociétal et ose se réinventer pour œuvrer à l’inclusion effective des plus marginalisés, et à leur émancipation.

Ceci reflète l’approche singulière de l’ISP, mise à plat par les affiliés en 2013 dans la brochure « Une autre voie vers l’intégration… » A l’opposé d’une vision réductrice de la personne, nous travaillons sur ses ressources pour développer son pouvoir d’agir. La confiance est instaurée à la faveur de périodes d’intervention assez longues. Nos pratiques, individualisées, misent beaucoup sur le groupe, qui soutient, transforme. L’optique est intégratrice des dimensions personnelle, sociale et professionnelle, grâce à la multidisciplinarité, au partenariat, au travail en réseau. La diversité des situations induit un renouvellement continu ; la standardisation est de facto limitée… Et ce qui lie tous ces ingrédients, c’est l’accompagnement !

Prendre les besoins des personnes comme point d’ancrage, c’est s’inscrire dans un paradigme inclusif. Et ça conduit à explorer les marges, voire à sortir du cadre. Depuis ses origines, notre secteur questionne les contours de l’action et crée de nouvelles réponses. Interpellant le politique. C’est là une de ses valeurs ajoutées. Il s’affirme comme partenaire à part entière des services publics, dans une optique de complémentarité. Car outre accompagner des publics en grande difficulté, nous réintroduisons de l’humain là où il n’y a guère que des procédures, développons des modèles d’intervention alternatifs, ouvrons des voies pour changer l’environnement sociétal… et pas seulement l’individu.

Or dans le contexte actuel, les freins à l’insertion sont peu investigués dans le paysage mais vus comme des caractéristiques intrinsèques aux personnes. On est prié de se conformer aux exigences d’un marché de l’emploi qui pourtant nous exclut si l’on est peu qualifié. Prouver qu’on cherche un travail est devenu une fin en soi… Il y a trop peu d’écoute, un déficit de sens.

Alors l’accompagnement vise à en recréer. Dans un cadre institutionnel souvent abscons, les démarches à accomplir par nos publics doivent être reliées à leurs problèmes concrets. La question du sens se pose aussi au niveau des équipes, dont l’inventivité déployée pour accompagner les usagers peut se heurter à l’âpreté des logiques de financement ou administratives. Et c’est pire quand elles reçoivent des injonctions incompatibles avec l’éthique-même de leur métier. Par exemple si on leur impose de transférer à des instances exerçant le contrôle social des données jugées confidentielles.

Ces dix-huit derniers mois, la tendance à la digitalisation de tout type de service s’est prodigieusement accentuée. L’enjeu devient majeur en termes d’accès aux droits fondamentaux. Pour la formation et l’accompagnement vers l’emploi, le présentiel est un impératif que nous défendons avec force. Tout en redoublant d’efforts pédagogiques contre la fracture numérique.

De longue date, la fédération réclame que le holà soit mis à la normalisation des personnes et à la pression qu’elle engendre. Au « contrôle » qui effraye et parfois sanctionne, nous préférons « poser le cadre », qui soutient, structure et sécurise socialement. L’ISP doit se prémunir contre tout modèle d’accompagnement trop formalisé, rigidifié, qui deviendrait inadéquat pour lutter contre l’exclusion. Nos démarches émancipatrices requièrent le plein exercice de la liberté associative et de l’autonomie des pouvoirs locaux.