Nous avons récolté des premiers témoignages de la reprise des activités dans les CISP.

En synthèse…

Une rentrée progressive des stagiaires a été réalisée dans les CISP à partir du 18 mai et se généralise en ce début du mois de juin. Les personnels investissent beaucoup d’énergie et d’ingéniosité pour reprendre leurs actions dans le respect des normes sanitaires. Les centres qui ont repris les activités sont souvent positivement surpris par la proportion plus importante que prévue de stagiaires reprenant les activités. Toutefois, le taux de présence des  retours varie d’un centre à l’autre et d’une filière à l’autre au sein d’un même dispositif. Une explication de ce relatif succès réside peut-être dans l’investissement important des centres dans les contacts préalables pris ou dans les mesures d’accueil et d’informations mises en œuvre. Petit bémol, après les premières séances, l’absentéisme semble vite reprendre à nouveau.

Au stress et à l’anxiété qui prédominent chez de nombreux travailleurs avant la reprise des activités succèdent souvent soulagement et satisfaction face à une reprise difficile mais maitrisée. Une nouvelle vie reprend, de nouvelles habitudes restent à acquérir et semblent plus rapidement que prévu s’installer…

Les centres n’ont pas le choix, ils doivent tous adapter leur offre de formation. On relèvera une accentuation des formations théoriques, de base ou techniques aux dépens des formations pratiques (surtout en EFT), un renforcement de l’accompagnement social, l’augmentation des animations de tous types. Partout, on constate l’adaptation de l’organisation des formations : dédoublement des groupes, limitation des présences, modifications des contenus des formations, nouvelles modalités dans les formations par le travail… L’organisation de stages est difficile ; de nombreux reports ou annulations sont à constater à la demande des entreprises particulièrement dans les services de santé ou de proximité. Les formations à distance se sont multipliées « à géométrie variable » ; il semble qu’elles relèvent davantage des pratiques des DéFIS plutôt que des EFT et sont développées principalement dans les filières FLE. Leur développement se heurte à de nombreux écueils à commencer par l’absence de matériel informatique ou de connexion chez de nombreux stagiaires… Les contacts à distance avec les nouveaux outils numériques ont été développés par tous les types de centres pour maintenir le contact avec leurs publics et ensuite les remobiliser.

Trois difficultés principales entravent l’entrée en formation ou la poursuite de la formation chez les stagiaires :

  • Garde d’enfants : Il apparait que ce sont les femmes qui ont le plus de difficultés à reprendre les formations ; la principale explication réside dans le fait que ce sont elles qui ont la charge de la garde des enfants ou des proches. Une nouvelle forme de discrimination genrée est constatée et dénoncée… L’ouverture des écoles à partir du 8 juin (et du 2 pour les maternelles) pourrait répondre en partie au problème si tous les réseaux parviennent à s’organiser pour accueillir les enfants.
  • Mobilité : absence de transports en commun ou incompatibilité de l’offre aux besoins. Des centres constatent chez de nombreux stagiaires, l’angoisse de prendre les trains ou bus alors que les médias invitent à privilégier des formules individuelles de déplacement qui leur sont inaccessibles. Des centres mettent en place des solutions originales pour se déplacer sur les chantiers externes.
  • Santé : les publics que nous accompagnons sont confrontés à de nombreuses formes de précarité, parmi lesquelles figure une fragilité en matière de santé. On constate la présence de nombreuses personnes à risque dans nos publics ou dans leur entourage vivant sous le même toit… Par contre, les personnes ayant souffert d’une infection au coronavirus se révèlent être rares, voire très rares dans les publics…On n’abordera pas ici les effets de la crise sanitaire sur la santé mentale de nombreux stagiaires…

Des difficultés dans le recrutement des stagiaires sont évoquées par de nombreux centres. Malgré l’adaptation de l’offre et de l’accueil des CISP, il n’y a pas de publics présentés ou adressés par les différents services du Forem. La collaboration des agents du Forem varie fortement d’un territoire à l’autre dans les démarches administratives d’inscription pour les DéFI’s ; elle est particulièrement regrettée là où elle fait défaut. Les CISP, encore plus que d’habitude, doivent compter sur leurs propres capacités pour recruter de nouveaux stagiaires…

La problématique des fins de contrat anticipées des stagiaires inquiète de nombreux centres. Aucune sanction envers un stagiaire n’est rapportée, mais la plupart de nos collègues sont inquiets et se disent vigilants à éviter de contribuer à des exclusions du chômage…

Les centres continuent à devoir faire face à d’importantes contraintes organisationnelles totalement inédites. Pour y faire face, ils doivent y consacrer énergie, créativité et…moyens financiers souvent trop limités :

  • Bénéficier de locaux suffisamment spacieux s’avère rare et complexe à obtenir pour la plupart des centres. Une des alternatives courantes est de dédoubler les groupes, ce qui a pour conséquence, une diminution des prestations. Sinon, l’imagination est ici au pouvoir : occupation de nouveaux locaux, location de tentes ou de containers. Un centre nous signale donner ses cours dans les serres de sa filière horticole, un autre nous affirme avoir décloisonné à cette occasion deux salles !
  • Accessibilité limitée ou impossible aux infrastructures habituellement mises à disposition dans les centres culturels, bibliothèques, académies de musique, locaux publics… Des alternatives sont difficiles à trouver, mais restent possibles. A l’inverse, un centre s’est privé d’un local qu’il se refuse de récupérer auprès de sans-papiers et de primo-arrivants qui y réalisent des activités collectives.
  • Effets pervers et malaises suite au port du masque sont observés, tant chez les stagiaires que les travailleurs. Un centre nous signale avoir dû lever après à peine deux jours l’obligation généralisée de le porter. Dans les filières FLE/alpha, le port du masque freine les apprentissages, des centres s’en passent ou le remplace par des visières.
  • Partout on se plaint de l’organisation lourde et difficile du nettoyage et des mesures de sécurité, de prévention et d’hygiène, sans compter les surcoûts induits.

Dans la recherche de solutions à tous ces problèmes, partenariats ou appels à des ressources externes se révèlent souvent gagnants…

Rappelons enfin que les difficultés économiques des EFT sont réelles mais varient fortement d’un centre à l’autre ; leur équilibre financier nécessite un chiffre d’affaires qui, actuellement, est loin d’être rencontré partout. Certaines mesures sectorielles auxquelles les EFT sont liées sont difficiles à mettre en œuvre comme de toute évidence dans l’Horeca ou dans le domaine de la construction où les chantiers chez des clients particuliers sont très contraignants et doivent parfois être reportés ou annulés.